Comment se font les vocations (14/03/2011)

MIDI LIBRE Édition du lundi 28 février 2011

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Comment Jo a décidé de devenir poète...

  Je n'étais ni un mauvais ni un bon élève »   , reconnaissait Georges Brassens.

Au collège, seules deux matières comptent véritablement pour lui : la gym et le français. Il excelle dans l'une et l'autre.

En gym, la classe de Jo et Victor avait pour professeur une figure du sport sétois : Louis Marty. Il était l'un des fils de Jean-Baptiste Marty, le fondateur, en 1885, de ce qui fut, jusqu'en 1960, une véritable institution, la pépinière de plusieurs générations de gymnastes, lutteurs, etc : le Stand Marty, qui était situé à l'emplacement de l'AmeriKlub.
Louis Marty avait été sélectionné trois fois aux Jeux Olympiques : en 1912 à Stockholm, en 1920 à Anvers et en 1924 à Paris.   « On l'appelait Louisou, se souvient Victor.   Il avait toujours une badine à la main. Il s'en servait pour taper sur le derrière des élèves quand ils montaient à la corde ».

Mais s'il y a un enseignant qui aura marqué Jo à vie, étant le véritable détonateur de sa vocation de poète, c'est bien Alphonse Bonnafé. Avec son précédent prof de français, Boiton, Jo avait découvert La Fontaine et la poésie classique. Bonnafé lui révèle Villon, Rutebœuf, Verlaine, Baudelaire... Sans oublier le Sétois Paul Valéry. «  Il subjuguait non seulement Jo, mais aussi tous les autres élèves, souligne VictorDéjà, il avait une apparence hors normes. Alors que tous les profs étaient vêtus de façon stricte, en costume noir et chapeau, 'Le Bonnaf', ou 'Le boxeur', comme on disait, avait une allure sportive, décontractée, en veste de sport et pull à col roulé. Il arrivait en classe sans serviette, avec trois bouquins sous le bras. Il faisait son cours assis sur le bureau, jambes pendantes. Il nous lançait :' S'il y en a un qui nous emmerde, je lui en colle une ! ' » Extraordinaire personnage que cet Alphonse Bonnafé, ami de Jean-Paul Sartre, avec qui il avait auparavant enseigné au Havre (et dont il sera un temps le secrétaire) et partageait la même passion pour la boxe. Il fut d'ailleurs champion de France universitaire. «   Il amenait parfois un gramophone et nous faisait écouter des œuvres comme 'L'invitation au voyage', de Baudelaire, chantées par des grandes voix lyriques ou de la Comédie-Française. Il pouvait alors être ému aux larmes. Jo était béat... ». Brassens (qui le reverra à Paris) dira plus tard : «  Chaque fois que j'écris un poème, je me pose la question : est-ce que ça plairait à Bonnafé ? »

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